Accueillir, soigner, guérir, huit siècles d’histoire hospitalière
Exposition des Archives Départementale du Rhône à la Maison du terroir Beaujolais à Beaujeu, mardi 12 mars 2024.
Notre petit groupe de 12 personnes a été accueilli par Justine, qui nous a présenté l’exposition qui s’est poursuivie en visite libre. Cette exposition se compose de 4 parties :
- Évolution d’un lieu d’accueil à un lieu de soins.
- Le personnel au service des malades. Le personnel religieux. Le personnel médical et hospitalier. Le personnel administratif et technique.
- Les Secourus et les malades. Les soins de l’âme. Les soins du corps. Les premiers soins thérapeutiques. Des évolutions scientifiques. La prise en charge des enfants abandonnés. La prise en charge des vieillards.
- L’Hôpital en temps de crise. Deux guerres mondiales. Les hôpitaux face aux épidémies.
Et pour terminer : Un heureux événement : naître à l’hôpital.
L’hôpital d’aujourd’hui, véritable plateau technique médical, est un centre de soins qui reçoit tout type de malades. Ce qui n’a pas toujours été sa mission première…
- Au Moyen Age, les premiers contours de l’hôpital se dessinent. Son identité trouve son origine dans l’application des principes de charité chrétienne : secourir un pauvre, c’est œuvrer pour le salut de son âme.
L’hôpital, du latin hospes « hôte », est d’abord un lieu d’accueil où l’on loge, nourrit, réconforte et soulage. Il reçoit pauvres, pèlerins et voyageurs. Une définition qui correspond bien à la première fonction de l’hôpital médiéval qui est un refuge, un lieu d’hospitalité attenant à un bâtiment religieux.

Un lieu de « consolation spirituelle » pour le soin de l’âme et du corps où sont pratiquées les prémices des soins thérapeutiques grâce à la confection de remèdes par l’apothicaire, lequel récolte les plantes médicinales dans le jardin des simples. On ne connaît alors ni l’origine des infections ni la manière de s’en prémunir. Puis l’hôpital accueillera aussi les femmes enceintes.
À ses débuts, les soins médicaux y sont très peu pratiqués, et l’on craint même d’y attraper des maladies au contact des pauvres et des indigents. L’hôpital est composé de vastes salles, très hautes de plafond, pour faciliter les courants d’air et évacuer les « miasmes »… d’immenses fenêtres (perchées à plus de 2 mètres de haut) restaient ouvertes quelle que soit la saison ! On trouve les premières traces de l’hôpital de Beaujeu en 1240. Les malades peuvent suivre la messe de leur lit, la chapelle étant établie au centre : le soin « spirituel » est très important. Le nom « hôtel Dieu » témoigne bien de cette dimension religieuse.
Les bienfaiteurs qui s’inscrivent dans la démarche de charité chrétienne font des dons, ou des legs : argent, mobilier, immobilier ou terres/vignes. L’hôpital de Beaujeu bénéficie de vignes en Brouilly, Morgon et Régnié qui sont commercialisés et apporte une rente supplémentaire à son fonctionnement. En 1807, les sœurs de Millière lèguent le domaine de Grange-Charton. Belleville également, sur le modèle des hospices de Beaune. On peut trouver des « bienfaiteur de lit » qui financent la construction d’un lit et octroie une rentre au pauvre accueilli.
- L’histoire de l’hôpital proprement dit commence dès le VIe siècle, quand il devient une institution. Ce n’est qu’au VIIIe siècle que l’hôpital est créé officiellement, repris au Moyen Âge par l’Église. Il prend son sens avec les Croisades et l’arrivée de grandes épidémies puis l’accueil des pauvres et des exclus. L’hôpital est assimilé à l’hospice. La médicalisation qui se met en place à la fin du XVIIIe siècle engendre nombre de conflits avec le personnel religieux mais va progressivement faire apparaître l’établissement de soins que nous connaissons.
Au Moyen Âge, en Europe les hôpitaux se trouvent étroitement liés à la religion puisqu’ils sont fondés par l’Église et administrés par des membres du clergé. L’assistance est fondée sur l’accueil des humbles, la miséricorde envers les affligés… puis par la suite, l’idéal de pauvreté s’ajoute à celui de la charité.
L’assisté est un pénitent, et sa souffrance, soulagée par la compassion, est une occasion de rachat (saint Augustin).
A Beaujeu, les sœurs de la communauté de Sainte Marthe, venues de Beaune, qui ont essaimé à Villefranche et Belleville également, sont en charge de l’hôpital. Elles bénéficient d’un apprentissage aux soins. A partir de 1789, ce fera l’arrivée de personnel médical et hospitalier, non clérical, qui collaborera pendant 200 ans : jusqu’à 1980, le personnel religieux était présent à l’hôpital de Beaujeu ! Actuellement cette présence se fait à la demande du patient.
Le personnel religieux occupait toutes les fonctions. Les draps étaient stockés et lavés 1 fois par an, mobilisant toutes les bonnes volontés !
- Les personnes accueillies: L’hôpital n’est pas encore un lieu de soins médicaux. Il accueille les pauvres malades, les vieillards et infirmes, les indigents ou nécessiteuses, les enfants abandonnés ou orphelins.
Les mendiants ou les personnes « désoeuvrées » subissaient un accueil forcé, proche de l’enfermement, et étaient mis au travail : à Beaujeu dans l’industrie du cuir, à Belleville dans le textile du chanvre. L’hôpital répondait davantage à une préoccupation d’isoler les malades et les fous de la société « plutôt qu’à celle de leur offrir l’espoir d’une véritable guérison. ».

Le soin se fait par des prières, mais aussi par des traitements à base de plantes, cultivées dans l’enceinte de l’hôpital au jardin des simples. Les principaux soins au corps consistent en des lavements ou des saignées (+ des sangsues et ventouses).
Jusqu’au 17e/18e siècles, les malades peuvent être installés à 4 par lit !
A la fin du 18e siècle, un tri des malades se fait : hommes/femmes : vieillards/aliénés. Les enfants abandonnés sont accueillis provisoirement puis dirigés vers La Charité à Lyon. Plus tard le relais sera pris par le Département avec la DASS et la Protection de l’Enfance.
Au XIXème siècle, les avancées scientifiques liées à l’étude du corps humain permettent que les expériences de traitement visent désormais la guérison. À partir du XXème siècle, grâce aux réussites du combat contre les maladies infectieuses. La victoire de Louis Pasteur sur les microbes et les bactéries constitue un tournant décisif qui va de pair avec de grandes avancées : hygiène, vaccination, prise en compte de la douleur. La découverte des antibiotiques, de l’antisepsie et de l’anesthésie font de l’hôpital un lieu qui a désormais vocation à la guérison du patient.
- Les crises à l’hôpital: Au Moyen Âge, avec les croisades apparaissent les grandes épidémies en Europe : Peste noire, lèpre… et l’hôpital n’est pas adapté pour accueillir les malades, les soigner (très relatif) et endiguer la propagation de l’épidémie… Les épidémies ont toujours traversé le pays de 1600 avec la peste et le choléra, ou en 2019 avec la COVID… la réaction de l’hôpital n’a pas trop changé.
La médicalisation qui se met en place à la fin du XVIIIe siècle engendre nombre de conflits avec le personnel religieux mais va progressivement faire apparaître l’établissement de soins que nous connaissons. Les progrès considérables de la médecine ouvrent peu à peu l’hôpital aux malades payants (Ignác Fülöp Semmelweis découvre l’hygiène en 1847, Louis Pasteur découvre l’asepsie en 1860 et Joseph Lister l’antisepsie en 1863).
Durant les guerres (1870 contre les Prusses, 14-18, 39-45), l’accueil des blessés militaires est distinct de celui des civils. Chacun a ses propres registres d’entrée/sorties. Le séjour des militaires, la chirurgie nécessaire, sont pris en charge par l’Etat.

Les personnes riches sont beaucoup moins malades car elles se nourrissent mieux. Les malades séjournent en moyenne 1 mois à l’hôpital : leur état s’améliore souvent grâce à une meilleure alimentation.